Les deux principaux partis politiques ont dévoilé leur plateforme électorale, la semaine dernière. Étant donné la situation économique difficile du Nouveau-Brunswick, la question de savoir quelle équipe sera la plus habile à manoeuvrer les finances publiques et favoriser la croissance économique dans le prochain mandat est cruciale.
Les libéraux promettent qu’au cours des quatre prochaines années, ils créeront 20 000 nouveaux emplois, limiteront l’augmentation des dépenses à un pour cent par année et veilleront à faire des économies au sein du gouvernement sans nuire aux services de première ligne. Des dépenses de 95 millions $ de plus par année sont prévues, tandis que l’équilibre budgétaire devra attendre à 2014.
Du côté des progressistes-conservateurs, on prévoit qu’il faudra débourser 141 millions $ de plus par année pour financer les promesses électorales. Un gouvernement Alward économiserait 150 millions $ en adoptant une politique de réduction des dépenses de 2 %, 120 millions $ sur quatre ans en annulant les gels d’impôt des plus riches, 25 millions $ en maintenant les impôts des corporations à 10 % et 10 millions $ annuellement en réduisant la taille du conseil des ministres à 15 membres. Le parti entend aussi équilibrer son budget en 2014.
D’après Charles Cirtwill, de l’Atlantic Institute for Market Studies (AIMS), si on se fie aux promesses électorales des politiciens durant cette campagne, la province sera sans le sou d’ici quatre ans. «Je ne suis pas le seul à le dire. Rappelez-vous qu’il y a quelques mois, tous les partis l’affirmaient. Je trouve ça étrange que soudainement, on parle comme si les coffres étaient pleins. D’un côté, les libéraux sont très discrets quand il est temps de dire combien vont coûter leurs promesses et de l’autre, les progressistes-conservateurs ne veulent pas avoir cette conversation non plus, car ils devront admettre ce qu’ils vont couper.»
Le président et chef de direction de l’AIMS, situé à Halifax, croit que les Néo-Brunswickois sont en droit de s’attendre à un plan économique très simple. «Contrôler les dépenses, s’assurer que la structure de taxation est compétitive, c’est-à-dire miser sur les taxes à la consommation et moins sur l’impôt sur le revenu et par conséquent, faire croître l’économie. Ce sont les trois choses qu’on devrait s’attendre de voir.»
Toutefois, selon lui, les deux principaux partis politiques ne semblent pas fournir de plan précis en ce sens. «Je ne suis pas familier avec les plateformes des trois autres partis, mais pour ce qui est des deux grands partis, aucun ne semble honnêtement souhaiter se baser sur ces trois piliers économiques. Ils semblent s’attendre à ce que l’économie se relève d’elle-même.»
M. Cirtwill croit notamment que la structure de taxation devrait être revue d’une façon qui pourrait affecter l’ensemble des contribuables et non uniquement les riches, comme le prétendent entre autres les progressistes-conservateurs. «Les chefs des partis politiques disent aux électeurs ce qu’ils croient qu’ils sont prêts à entendre, indique M. Cirtwill. Le défi pour eux est d’être honnête par rapport à ce qu’ils devront couper pour offrir un service, pas seulement d’affirmer que l’économie va croître et que ce sera suffisant pour payer.»
Le directeur du département d’économie de l’Université du Nouveau-Brunswick, Constantine Passaris croit pour sa part que la situation fiscale de la province n’est pas encore sur des bases solides et que les partis politiques font bien de continuer d’investir pour stimuler l’économie. «Je fais toujours la distinction suivante avec les promesses électorales : est-ce un investissement pour l’avenir du Nouveau-Brunswick ou est-ce une simple tactique pour attirer des électeurs. Si les partis nous présentent un plan pour l’éducation, pour supporter la création d’emplois, les soins de santé universels, ce sont les investissements qu’un gouvernement du 21e siècle doit faire pour que le secteur privé puisse pleinement jouer son rôle de soutien économique.»
Selon M. Passaris, la promesse des libéraux de faire croître la population au moyen de l’immigration, notamment dans les communautés francophones, va dans le bon sens, de même que les plans des deux partis d’investir dans le Nord pour assurer la croissance économique.
«Si je devais choisir un enjeu économique parmi tous les enjeux que nous connaissons : la dette publique, l’énergie, etc. poursuit l’économiste, je dirais que la préoccupation numéro un devrait être la création d’emplois. Et nulle part ailleurs n’est-ce plus important que dans le Nord, en termes d’implication du gouvernement.»
M. Passaris estime que la plupart des partis ont adopté une approche plus centriste par rapport aux finances publiques. Même le NPD, remarque-t-il, propose des idées qui s’éloignent des principes sociaux-démocrates auxquels il a habitué ses électeurs et s’approche même parfois de l’idéologie conservatrice.